Ok, j’ai joué aux 3 maps de Magnolia en HMP, sous ZDoom, avec des sauvegardes.
Magnolia fait partie des wads que j’attendais pour cette année, avec à la fois de grosses attentes, mais aussi une immense appréhension. En effet, Ribbiks a tendance, avec ses derniers wads, à chercher l’innovation, à proposer quelque chose de jamais vu dans Doom, et à renouveler son style (tout en restant sur une difficulté extrême faite pour ceux qui masterisent Doom). Je craignais donc d’avoir devant les yeux quelque chose qui aille encore plus loin dans des concepts que personnellement je n’aime pas, mais ce n’est pas ce qui s’est passé.
J’y reviens.
Après Frog et Toad, deux wads pour le fun qui proposaient des successions d’idées de challenge, Magnolia se devait d’être un projet « sérieux », et sur ce plan, il ne déçoit clairement pas !
Quand on démarre Magnolia, on est tout de suite frappé par la beauté des environnements et par les nouvelles couleurs turquoise, rose, et violette. L’architecture est également notable : le wad est rempli de grandes structures imposantes, avec des lignes souvent non-orthogonales, différentes sortes de matériaux utilisés (briques, métal, bois etc.), et de grands panneaux lumineux qui se voient instantanément et qui contrastent par rapport aux environnements sombres et au ciel spatial.
Ribbiks évoque une esthétique « gelée », mais personnellement, ce n’est pas la sensation que ça m’a donné (même s’il y a effectivement des cristaux de glace et de stalactites par endroits). Ca m’a plutôt fait penser à quelque chose d’onirique et de sidéral.
Il n’y a pas non plus que du turquoise, du noir et du rose : il y a aussi du marron et du rouge, qui apparaissent notamment dans certains endroits de la map 03 et qui apportent un contraste sympa, surtout pour une map aussi gigantesque et dans laquelle on se perd inévitablement.
Allons droit au but : visuellement, il s’agit du plus beau wad de Ribbiks. C’est encore plus beau que Stardate 20X7 je trouve, et on retrouve les plus beaux éléments de ses autres wads : les courbes naturelles de Swim With The Whales, les beaux contrastes, les gradients lumineux… C’est peut-être un chouïa moins détaillé que certains passages de Stardate 20X7 (comme le secret derrière la zone de départ du joueur dans la map 03 de 20X7), mais j’ai trouvé le rendu global légèrement meilleur. Autre chose à noter : Ribbiks ne suit pas vraiment les codes d’alignement modernes (ceux que l’on retrouve chez les « disciples d’esselfortium »), mais son style reste soigné, malgré quelques utilisations de textures que je n’ai pas trop aimé. Enfin, rien de grave, car globalement c’est magnifique.
Magnolia propose des modifications au gameplay standard de Doom II, avec notamment une nouvelle sorte de Cyberdémon (bien moins résistante) et le fait que les Barons ne comptent plus dans le total des ennemis à tuer pour faire un UV Max. Je vais revenir sur ces éléments au fur et à mesure de leur apparition.
Concernant la difficulté globale, j’ai trouvé le wad déjà très dur en HMP, mais j’ai pu me sortir de la plupart des passages en relativement peu de temps (avec beaucoup de Die & Retry et de sauvegardes, évidemment, mais par rapport à l’UV de Stardate 20X7, le HMP de Magnolia est évidemment plus simple). Pour l’UV de Magnolia, j’imagine que Ribbiks enlèvera de la vie et des munitions, puisque Magnolia est « confortable » niveaux munitions en HMP (à part la map 01) et puisque les wads modernes de Ribbiks tendent à jouer énormément sur le manque de munitions.
Je n’ai pas trop compris le besoin de Ribbiks de sortir l’UV plus tard… Les gens qui pleurent parce que l’UV est trop dure alors qu’on écrit dans le readme que l’UV est dure, eh bien voilà quoi, à un moment, on ne peut rien faire pour eux. Surtout si c’est dans un wad fait par un auteur qui a la réputation de faire des trucs durs…
Voici mes commentaires à chaud pour chacun des 3 niveaux (en HMP, car on peut supposer que pas mal de choses seront différentes en Ultra-Violence) :
Map 01 :Une map grande, non-linéaire et complexe, qui laisse beaucoup de place à l’exploration. Pour se sortir de celle-ci, il faudra explorer chaque recoin et ne pas hésiter à sauter sur les rebords pour trouver des boutons cachés.
Avant d’être plongé dans l’action, j’aurais peut-être apprécié une introduction un peu plus spéciale, avec une vraie mise en scène, comme la map 01 de Swim With The Whales ou celle de Crumpets. Juste histoire de présenter le thème du wad calmement et de laisser le joueur s’imprégner de l’ambiance.
Tant pis !
Le rythme du niveau est assez varié : il y a une bonne alternance entre les pièges et les phases d’exploration. De plus, étant donné qu’on se perd inévitablement entre les différents lifts, les téléporteurs, les séquences de boutons à chiffres romains, etc., on ne se sent pas trop souvent sous pression (hormis dans les pièges en eux-mêmes).
Au sujet de ces pièges, beaucoup d’entre-eux demandent au joueur d’y aller en mode Pacifist (celui avec le Cyberdémon qui nous allume depuis son parapet, et le combat à la fin, dans la zone carrée avec les torches inversées). Ca, personnellement, je n’ai pas trop aimé. Devoir jouer en Pacifist, c’est esquiver les monstres et diriger les projectiles sur les autres monstres pour provoquer de l’infight, et en fait, je trouve que scénaristiquement, ce n’est pas terrible : il n’y a plus de Doom Marine et de démons de l’Enfer, il n’y a que des éléments de gameplay à exploiter par un joueur. Ca nous met brutalement devant les yeux le fait que nous sommes devant un bête jeu vidéo, ça casse totalement l’immersion et l’histoire. Mais bon, soit.
Du point de vue du gameplay, le reste du niveau est plutôt sympa, mais on manque souvent de munitions. C’est là qu’il est bon de noter que les Barons ne comptent pas en UV Max pour ce wad : il n’est plus obligatoire de les tuer. Le wad nous demande d’être suffisamment bons pour les laisser en vie et devoir éviter continuellement leurs projectiles. C’est original en tant qu’approche à un « problème » très moderne : les joueurs disent de plus en plus qu’ils se lassent du Baron, qu’il est trop long à tuer. Du coup, dans certains wads modernes, les Barons sont très peu utilisés (Back to Saturn X) ou remplacés (Valiant, Mayan Mishap, Bloodstain, les deux versions de MAYhem 2018, etc.). Jusqu’ici, Ribbiks n’avait pas semblé prêter une attention quelconque à ce sujet (vu que Sunlust et Stardate 20X7 utilisent le Baron de manière libre), et maintenant, voilà qu’il fait que les Barons ne comptent plus pour l’UV Max. Soit.
Mais il n’empêche que cette map 01 de Magnolia est avare en munitions.
Autre truc notable sur le gameplay de cette map : on remarque qu’il y a un nouveau type de Cyberdémon, un Cyberdémon avec le câblage turquoise au lieu de rouge. Il est exactement pareil à un Cyberdémon normal, mais n’a que 1000 points de vie (soit le quart de la vie du Cyber normal). Le Cyber normal est heureusement toujours là.
C’est intéressant comme variation, car ça permet d’avoir un monstre aussi dangereux que le Cyber mais qui dure bien moins longtemps. Il peut donc être utilisé dans d’autres types de scénarios de combat, et c’est justement ce que Magnolia va proposer.
J’ai bien aimé quelques-uns des concepts de cette map, notamment les boutons numérotés en chiffres romains (je n’ai pas trouvé le secret qui est débloqué par ces boutons, mais j’y reviendrai) qui nous obligent à réfléchir par où on passe pour lever ou baisser certains barreaux. J’ai aimé également les torches inversées à la toute fin de la map.
Il faudra que j’y rejoue, pour voir tous les secrets que j’ai raté (et il y a sans doute des combats cachés, vu qu’il y a un BFG9000 en secret), mais au premier abord, parmi les 3 maps, c’est celle que j’ai la moins aimée.
Map 02 :Ah, un gimmick intéressant
Cette map introduit un concept qui va rester pendant tout le reste du wad : des « Evil Eyes » qui tirent des projectiles en continu sur le joueur. On ne peut pas les tuer, il faut juste arriver à éviter leurs tirs et sortir de leur champ de vision.
Ils sont extrêmement dangereux, car ils tirent des projectiles d’Arachnotron : c’est douloureux et ça va vite.
Après une introduction de ce nouvel élément de gameplay, la map nous met en face de 4 combats à survivre avant de pouvoir accéder à la zone finale. Les 4 combats peuvent être faits dans l’ordre que l’on veut, et ils reposent tous sur l’utilisation de l’Evil Eye pour tuer les ennemis. Le truc, c’est que les ennemis ne changent pas d’objectif s’ils sont touchés par l’Evil Eye, ils continuent à vouloir nous tuer, et c’est très bien !
Il faut donc être doublement attentif et faire attention aux ennemis et aux tirs de l’Evil Eye. Ca donne des scénarios novateurs et très corsés !
Une map plus courte, qui n’est ni plus ni moins que l’introduction d’un concept. Mais elle le fait bien.
Map 03 :Ma map préférée dans le wad. Elle a des faux airs de Swim With The Whales map 03, de par sa grandeur et sa complexité (mais la progression est ici beaucoup plus compliquée). Elle m’a vraiment rappelé l’ancien style de Ribbiks, notamment au début avec l’obtention progressive des armes et les premiers pièges dans un layout interconnecté. Excellent.
Visuellement, j’ai beaucoup aimé le thème. En plus des couleurs caractéristiques de Magnolia, on trouve quelques passages avec du rouge et du marron. Il y a par exemple certaines zones où on peut voir un joli contraste entre le turquoise vif et le marron rouillé des textures « Ogro » chères à Tormentor667, c’est magnifique.
Il y a plusieurs moments durant mon parcours de la map où je me suis dit : « Ok Ribbiks, bordel quel génie !! ».
De tête, je pense par exemple du passage au nord-ouest de la map, l’endroit où on est systématiquement téléporté vers un socle avec un Mancubus quand on s’approche de la structure, et il faut en fait sauter sur le côté pour trouver un passage afin de franchir les lignes de téléportation pour affronter 3 Cyberdémons et les téléfraguer en utilisant à nouveau les lignes de téléportation.
Je parle aussi des 3 « téléporteurs » de couleur qui nous envoient d’un bout à l’autre de la map alors qu’on fait juste un tour dans la structure, c’est bien pensé. Et d’autres petits moments comme ça
Evidemment, il y a des séquences de saut, mais elles ne sont pas si hard que ça, heureusement (et il y a peut-être, comme pour la map 03 de Swim With The Whales, un secret qui nous les fait passer). C’est bien, Ribbiks s’est fait plaisir dans Toad en ce qui concerne les séquences de saut, et ici il y a été soft. :p
J’ai bien aimé la quête pour les 4 boutons numérotés en chiffres romains, qui nous donnent accès à la clé bleue (et à un combat assez hard).
Je n’ai trouvé que 7 secrets sur 17 dans cette map 03. Lorsque l’UV sortira, je me la referai et je tâcherai de chercher mieux.
Il y a plusieurs pièges mémorables et difficiles, ce qui est ce que je recherche dans les wads de Ribbiks. Celui qui m’a fait le plus galérer est le piège pour la clé-crâne jaune (juste avant la finale), avec deux Evil Eyes positionnés en hauteur de manière à ce qu’on ne campe pas, plein de Cacodémons, et des Cyberdémons sur l’un des côtés de la zone de combat. C’était vraiment intense
Bizarrement, la finale (à base de jeu en Pacifist et d’Evil Eyes en masse) ne m’a pas paru si dure que ça. Je pense qu’elle manque de panache et qu’elle se finit assez vite, mais bon, on verra ce que ça donne en UV.
Voilà, donc sur le global, j’ai bien aimé Magnolia !
Je m’attendais à encore plus de puzzles très complexes et de séquences de saut, mais finalement Ribbiks y a été molo et c’est très appréciable. Bien sûr, la progression est plus complexe que dans la moyenne des maps de Doom, mais au moins, chaque bouton ressemble à un bouton (hormis certains cas à noter, comme le "bouton" de la clé rouge dans la map 03 ou le mur de flammes violettes à appuyer à un moment dans la map 01), on ne reste jamais bloqué pendant des heures et des heures, et les puzzles les plus difficiles ne sont pas pour la progression obligatoire (mais pour les secrets). Ca n’a donc rien à voir avec un Eternal Doom par exemple.
J’y rejouerai avec plaisir lorsque l’UV sortira, je pourrai voir les secrets (et combats secrets, surtout) que je n’ai pas vus et je pourrai commenter plus en détail en ce qui concerne le gameplay (on pourrait déjà parler de la version HMP pendant des pages, mais perso je n’ai pas trop le temps).
Je tâcherai de faire des FDAs sur cette version UV si j’ai le temps (ce week-end je ne pouvais pas, il faut que je mappe pour MAYhem 2018 Orange).
Si je devais comparer Magnolia avec les autres wads de Ribbiks… je dirais que c’est un peu tôt pour me prononcer, vu que je n’ai pas joué à l’UV, mais je crois que je le mettrais au même niveau que Stardate 20X7 : c’est un excellent exemple de « Ribbiks moderne », avec des maps rythmées, pas mal de gimmicks et de concepts, une progression pas forcément intuitive mais toujours intelligente et intéressante, et avec évidemment une très grande difficulté sans avoir forcément des méga-tonnes de monstres. Ce n’est pas mon wad préféré de Ribbiks, mais c’est le plus joli (avec Stardate 20X7). Dommage qu’il n’y ait pas plus de maps, car ce thème est tellement beau, il gagnerait à être exploré davantage.
Ce qui est différent dans Magnolia par rapport aux autres wads de Ribbiks, c’est le grand nombre de secrets (la map 09 de Stardate 20X7 était un peu comme ça elle aussi).
Ca valait le coup d’attendre
N’hésitez pas, foncez, c’est un highlight de 2018 et une expérience qui vaut clairement le détour pour peu qu’on veuille s’imprégner de son style si particulier !